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Dépression

Je me suis sentie vide. J’ai vu tout noir. Le temps avait cessé. J’étais là, perdue, sans bouger, le regard dans le néant. J’avais cessé d’exister pendant un bref instant.

Mon corps, mon cœur et mon esprit ont décidé d’arrêter de se battre. Les murs et même les fondations se sont écroulés. Un manque d’entretien. Un manque d’amour. Un manque tout court.

J’étais un peu comme les vieux bâtiments historiques que l’on voit à Montréal. Mal entretenus depuis tellement d’années qu’ils finissent par demander plus de temps, plus d’énergie et plus de savoir-faire pour retaper et rénover. Je suis comme ces immeubles.

À travers mes fondations, on a trouvé les traces du passé, des blessures, des cicatrices. J’avais toujours repeint par-dessus en me disant que ça cacherait un peu le laid. Je décorais souvent pour faire changement, mais surtout pour bien paraître, avoir l’air en santé, moderne. Mais les fissures ne tardaient jamais à devenir visibles. Un jour, j’ai manqué de plâtre et de peinture. C’était fini, je devais arrêter de patcher les défauts de ma structure.

Mes plafonds ont mal pris le choc, tellement orgueilleux. Ce n’était pas possible qu’autant de trouble fût enfoui dans le grenier, l’espace était si petit. Il était tellement caché, à l’écart, qu’il était facile pour moi de l’ignorer : « Ça va, l’hiver achève, les poutres pourront se reposer bientôt. » Mais chaque hiver, c’était la même histoire. La fragilité s’est propagée un peu plus chaque saison.

Aujourd’hui, les rénovations ne suffisent plus. C’est une démolition entière qui est nécessaire. Je ne peux plus tenir debout avec toute l’usure accumulée depuis des années. Il faut reconstruire en entier. J’ai déjà magasiné les ouvriers. Ils sont efficaces, accessibles et ont le matériel nécessaire pour me fournir de bonnes fondations. Je vais me reconstruire, pièce par pièce, jusqu’au dernier coup de pinceau.

Les ouvriers qui m’appuient sont à l’écoute, ont de l’expérience et m’aident à me reconstruire chaque jour qui passe. J’avoue avoir eu envie de rester à l’état de démolition permanente, mais on ne m’a pas lâché, il restait encore des fondations potables, utilisables.

Maintenant, la structure a été refaite en entier, plus forte qu’avant. De nouveaux matériaux aideront mon immeuble à tenir le coup très longtemps. Un ajout nécessaire. La moitié de la construction est faite. Il ne me reste qu’à finaliser les murs, peinturer et décorer chaque pièce. Je me promets d’entretenir mon nouveau bâtiment et surtout de ne plus jamais le laisser dans un état d’abandon.

Des fois, il faut juste s’arrêter et accepter qu’il faille reconstruire à zéro.

 Valérie_réviseure

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