La cicatrice du coeur

Le 29 décembre 2015, alors qu’il y avait une tempête qui a duré toute la journée, j’ai reçu un appel sur mon cellulaire qui allait changer ma vie.

Je réponds au téléphone et, au bout de la ligne, mon frère avec une voix paniquée me demandant où j’étais. J’ai tout de suite senti que quelque chose n’allait pas. J’ai tout de suite pensé qu’il avait eu un accident. À mon tour, je lui demande où il est. Mais je ne me doutais jamais qu’il m’annoncerait que le premier homme de ma vie, mon papa, était décédé.

 

Non, tu ne comprends pas. Papa est mort, m’a-t-il dit.

 

Il venait de le retrouver par terre dans la maison familiale. Quel choc pour mon frère qui était entouré des policiers, et qui devait me l’annoncer ! Mon père est décédé à la suite d’un arrêt cardiaque, seul à la maison, et il devait voir son cardiologue une journée plus tard. 24 heures de plus et mon père aurait été à l’hôpital ou une personne qualifiée aurait pu le réanimer. Je dois spécifier que mon frère a essayé de le faire et vraiment, il a tout essayé, mais ça devait faire quelques heures que mon père était au sol alors il ne pouvait rien faire sauf essayer et pour ça, il est un héros à mes yeux.

Après son annonce, je me suis écroulée en criant : « MON PÈRE EST MORT ! » Avant de raccrocher, je lui ai même demandé s’il en était certain.

Comme si j’avais encore un dernier espoir.

Je me suis ensuite dit que je n’avais pas le droit de m’effondrer, du moins pas tout de suite, mon frère en avait assez vécu et je devais lui enlever un peu de pression sur ses épaules et l’annoncer à mon autre frère, ainsi qu’à notre mère qui travaillait. Je devais lui dire que l’homme qu’elle aimait depuis 35 ans, et qu’elle avait quitté ce matin pour se rendre au travail, était parti.

Cette situation l’a démolie.

À partir du moment où je le lui ai annoncé, j’ai pris leur peine sur mes épaules. Je travaille dans le domaine de la santé et côtoie la mort régulièrement, je me suis dit que ça aurait dû être à moi de le retrouver par terre et non à mon frère d’avoir un tel choc… Mais la vie est ainsi faite et avec du recul, je me dis que mon frère a été parfait.

Ce n’est pas normal de quitter ce monde à 57 ans avant même sa retraite.

De se retrouver à l’hôpital inanimé, entouré de nous tous. Un passage important, mais combien douloureux où on est dans le déni, qu’on ne veut pas y croire !

Il y a ensuite le salon où toutes sortes de monde se présente et dont tu ne connais même pas la moitié. Des moments où tu voudrais être seule avec lui et les mettre tous à la porte pour pleurer ou crier. J’ai compris, après un moment, qu’il était aimé et qu’ils avaient le droit de lui dire adieu aussi. D’autres venaient pour nous. Recevoir un énorme câlin et se faire dire : «Je suis là pour toi. » Ça fait un bien énorme.

En conclusion, mon papa a 9 petits-enfants qui aiment leur pépère. Il était notre papa grognon à mes frères et moi, mais il était tellement serviable et avait un grand cœur.

J’ai compris que ce n’était pas moi qui avais fait de la peine à ma mère, mais que c’était simplement la situation et qu’on ne pouvait rien y changer. Mon plus grand regret est sûrement de ne pas lui avoir dit un dernier adieu. La première année, c’est difficile de s’en remettre, car toutes les premières fêtes sans lui sont difficiles à traverser.

Maintenant, près de deux ans après son départ, il y a encore des moments difficiles, mais on avance et de voir ma mère et mes frères sourirent malgré la douleur me fait du bien.

Nous avons tous un grand vide dans nos cœurs et les cicatrices de notre douleur diminuent sans jamais l’oublier.

Ma plus grosse crainte est que mes enfants finissent par l’oublier.

J’espère maintenant le revoir dans mes rêves, cet homme que je voyais si fort…

 

Mon petit papa d’amour.

 

Texte par Marie-anne Ouellet 

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