Comme si on pouvait décider de ça…
On guérit des cancers, on communique avec des gens à l’autre bout de la planète en quelques secondes et on a envoyé des hommes sur la lune donc, forcément, on peut tout bonnement décider de ne pas s’attacher? C’est la pire bullshit!
On peut décider de faire comme si… On peut décider de ne pas le montrer. On peut très bien décider de ne pas le vivre pleinement, mais on ne peut pas décider de s’attacher ou non. C’est encore hors de notre contrôle.
Ironiquement, l’attachement est devenu une raison de se détacher. Quand celui ou celle qui ne devait pas s’attacher franchit la limite, l’attachement devient un motif de reproche: « Je te l’avais dit de ne pas t’attacher! » C’était vraiment gentil de ta part de me prévenir, vraiment! Comme ça, au moins, je sais que c’est ma faute, que c’est moi qui a brisé le contrat! Merci de me faire feeler cheap de t’aimer!
Le problème dans tout ça, c’est que quand l’attaché franchit cette fameuse limite, ça ne signale que très rarement la fin d’une relation. Il n’est pas plus naturel de refuser l’affection, de tourner le dos au boost d’ego, que de décider de ne pas s’attacher. Si seulement ça pouvait en rester là, mais non, on continue d’en ajouter. On continue de chercher à séduire, de stimuler cet attachement supposément non désiré. C’est comme une dose de la plus belle drogue qui soit et on en devient rapidement dépendant. Certains en ont plus besoin que d’autres. Certains ne vivent que pour ça, les high de phényléthylamine aussi temporaires que les conquêtes qu’ils collectionnent. En 2017, on appelle ça « to keep on the hook ».
Je suis peut-être l’éternelle célibataire parce que j’ai toujours refusé de nier mon attachement. Ça arrive tellement rarement! Je n’ai jamais eu honte d’aimer et je m’octroie le droit (j’ai le contrôle là-dessus, au moins) de vivre les émotions quand elles passent. Je les vis pour moi, avec moi-même, sans scandale, sans crier et sans scène, et je les partage avec ceux qui veulent bien les vivre avec moi, sans m’imposer. Malgré tout ça, à chaque nouvelle fois où j’entends quelqu’un me dire « Surtout, ne t’attache pas » (pas que ça se soit produit très souvent), j’entends quelque chose de complètement différent; j’entends « S’il te plaît, attache-toi, mais ne t’attend pas à ce que je te rende la pareille. »
R’garde, je vais m’attacher si mon cœur (lire ici : mes hormones) décide de s’attacher. Si je me plante, ce sera mon problème et je dealerai avec ça en temps et lieu. Si tu es là pour me supporter à ce moment-là, peut-être que l’attachement problématique n’aura pas été vain.
En attendant, si vous avez peur que quelqu’un dans votre vie s’attache « trop », commencez donc par lui sacrer patience. Vous savez très bien qu’il (elle) mérite mieux que ça…
Crédit photo couverture Eternal Sunshine of the Spotless Mind
Texte par Claudie Saulnier