Si je n’avais écouté que les élans de mon cœur durant la grossesse de notre troisième enfant, notre maison compterait au minimum trois chats et un chien supplémentaires. Heureusement, j’avais un chum beaucoup plus terre à terre que moi pour me ramener à la réalité. Il me disait qu’à la suite de la grossesse viendrait inévitablement un bébé, et que d’avoir une ménagerie à la maison et déjà deux enfants n’était peut-être pas la meilleure des idées.
Durant ces neuf mois à porter la vie, j’ai été envahie par de nombreux élans d’adoption et de sauvetage animalier! Je me suis rendu compte que l’instinct maternel (ou les hormones, appelez ça comme vous voulez) n’avait pas vraiment de limite et, surtout, qu’il n’y avait pas de raisonnement possible afin de l’apaiser, sinon de lui donner raison…
Tortue et solidarité féminine
Tout a commencé en juin, en me rendant au boulot avec, à ce moment, seulement deux mois grossesse de complétés. En voiture, je croise une tortue en bordure de route, dans la voie inverse. L’endroit où elle se trouve porte à croire qu’une voiture arrivant à contresens pourrait ne pas l’apercevoir et la frapper. Sachant que c’est également le temps de la ponte pour les tortues, je me doute bien que si elle se trouve là, c’est fort probablement qu’elle a choisi d’y pondre ses œufs. La maman en moi ne peut fermer les yeux devant cette situation et continuer tout bonnement son chemin. Un élan de solidarité féminine de femme se préparant à donner la vie m’envahit et je stationne ma voiture pour aller à la rencontre de la tortue. Je ne m’étais pas trompée : maman tortue était effectivement en train de pondre sa progéniture en bordure de route! Pas de doute : si je ne fais rien et qu’une voiture passe, sa descendance ne verra jamais le jour.
Cette espèce de tortue, vraisemblablement la tortue serpentine, on ne doit pas la déplacer avec nos mains, car elle pourrait nous mordre. Je sors alors donc de la voiture pour aller lui parler et lui faire entendre raison. (Je sais que ce n’est peut-être pas la solution la plus efficace, mais c’est la seule que j’avais en tête à ce moment-là.) La pauvre maman tortue semble épuisée et surtout pas très encline à écouter mes conseils de sécurité. En quête d’une solution pour la survie de cette famille, je retourne chez moi pour aller chercher un piquet de déneigement. Fière de mon idée, je plante celui-ci jusqu’à côté de ma nouvelle amie et de ses futurs rejetons. Au moins, les voitures seront forcées de contourner l’emplacement. Même si j’ai peut-être sauvé cette tortue d’une mort imminente, je tiens à vous rassurer que je n’ai jamais envisagé de l’adopter, ce qui n’est pas le cas des autres animaux à venir…
Le chat
Pour mettre encore une fois mes sentiments de maman à l’épreuve, un chat s’est présenté chez nous. Il semblait ne pas avoir mangé depuis plusieurs jours et question d’attendrir encore plus mon cœur, il n’avait pas de queue! Il avait certainement perdu celle-ci dans un combat épique contre un raton laveur, ou pire encore, à cause du gel en plein hiver. (Je sais, les scénarios se bousculent dans ma tête.) Ayant déjà un chat à la maison, je tente de convaincre mon chum de l’adopter, mais la réponse est ferme, négative, et surtout, sans appel! Ma seule victoire est de pouvoir lui donner de la nourriture à l’extérieur. Il a rôdé près de notre maison quelques jours jusqu’à ce que la patience de notre chat ait atteint sa limite. Après une féroce bagarre nocturne, le chat sans queue n’est jamais revenu.
Le chien
Nous recevons un appel concernant la possibilité qu’un chien, dont nous connaissons les maîtres, serait peut-être à donner sous peu. On parle ici d’un très, très gros chien! Encore une fois, mon cœur de mère vacille. Mon chum est très réticent à cette idée en pensant aux responsabilités supplémentaires et à la venue de notre bébé, le gros bon sens, quoi! De mon côté, le gros bon sens semble avoir pris une pause, et au contraire, je suis très emballée à l’idée de rescaper ce sympathique canidé. La vie aura finalement décidé pour nous, puisque les maîtres décideront de garder leur chien.
Les poules
Saviez-vous que chaque automne, plusieurs propriétaires de poules pondeuses choisissent de s’en départir parce que celles-ci sont moins productives? Sentant encore l’instinct refaire surface, j’ai proposé à une amie d’offrir une maison de retraite à ses deux poules avant l’arrivée de l’hiver. Nous nous sommes donc retrouvés à agrandir notre cheptel de poulettes au grand plaisir de notre coq.
L’autre chat
Nous apprenons que des amis déménagent et souhaitent se départir de plusieurs meubles et de leurs deux chats. Encore une fois, mon cœur fond devant ces deux boules de poil. Nous en discutons et finalement, puisque nous avons déjà un chat à la maison, toute la famille est d’accord pour procéder à l’adoption d’un des chats, mais pas les deux. L’argument final : trois chats à la maison en plus des poules, des abeilles et des enfants, dont un bébé naissant, serait peut-être un peu intense, instinct maternel ou non.
Heureusement, cet élan irrationnel d’adoption s’est estompé avec la naissance de bébé. Difficile de comprendre ce qui se passe vraiment pendant ces neuf mois, mais il est certain que la grossesse fait vivre plusieurs transformations. On termine donc ce récit avec une mini ménagerie composée de deux chats, six poules, un coq et des milliers d’abeilles pour du bon miel! On l’a échappé belle!
N.B. Chères lectrices, chers lecteurs, saviez-vous que… deux théories s’affrontent quant à l’existence de l’instinct maternel? Pour l’écriture de ce texte, j’ai fait quelques recherches, et à ma grande surprise, j’ai découvert que selon certains scientifiques, l’instinct maternel ne serait pas inné chez les mères, comme le prétend Darwin. De plus, selon certains, il s’agirait d’un concept réducteur pour la femme. Je vous laisse ici quelques liens qui vous permettront d’en apprendre plus sur le sujet et de forger votre propre opinion. Bonne lecture!


https://www.scienceshumaines.com/y-a-t-il-un-instinct-maternel_fr_2849.html
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1063121/instinct-maternel-realite-universelle-biologique