Je suis une personne sensible, extrêmement sensible. Beaucoup de situations d’injustice me font réagir, fortement même. Ça vient me chercher directement dans les tripes. Les situations d’injustice sont aussi souvent synonymes de violence. Que ce soit de la violence psychologique, de la violence physique, de la violence systémique, ou encore tout ça en même temps. Donc, en plus de venir me chercher au plus profond de mon être, ça me tord le cœur. En voyant circuler les vidéos à propos de la mort cruelle de George Floyd, j’ai eu mal. J’ai eu beaucoup de peine, mais surtout une colère est montée en moi. Les jours ont suivi et mes fils d’actualité sur les réseaux sociaux ont été bombardés d’articles venant de diverses plateformes, d’autres histoires de victimes de racisme, de messages solidaires, de vagues d’espoir et encore une fois de la vidéo brutale qui circulait un peu partout. C’était à la fois beau de voir tout le monde se mobiliser, mais aussi complètement bouleversant. C’était comme si à chaque fois que j’ouvrais mes réseaux sociaux, mon cœur se tordait un peu plus. J’avais l’impression de manquer d’air tellement ça me faisait mal.
Je suis confrontée aux injustices et à la violence constamment dans mon travail. J’essaie aussi de m’informer le plus possible sur l’actualité. Puis, je ne manque jamais une occasion d’éduquer mon entourage sur divers sujets qui me touchent. Malgré tout, j’ai parfois l’impression de ne pas en faire assez, de ne pas dénoncer assez, de ne pas m’informer assez. J’ai alors décidé de prendre une pause. Une petite coupure des réseaux sociaux pour accueillir mes émotions et respirer à nouveau. Avec cette petite pause, j’ai réalisé que c’est correct de se mobiliser et de crier haut et fort. C’est correct aussi de partager sur les réseaux sociaux des messages d’espoir et de se joindre aux mouvements de solidarité. Mais c’est aussi correct d’avoir besoin d’une pause pour se sortir la tête de l’eau et respirer. Sachez qu’il est important de se respecter et de s’écouter. Il est bien évidemment important de se tenir debout pour dénoncer les injustices. Sauf que pour être de bons alliés, il est primordial d’être fort. Pour revenir en force, il est parfois nécessaire de prendre un pas de recul. Avec ce pas de recul, il est alors possible de prendre le temps d’analyser ce qu’on ressent, de faire de la place à nos émotions. Puis, cela nous permet de nous introspecter aussi par rapport à nos propres gestes ou paroles opprimants. Parce qu’on aura beau se déclarer anti-raciste, si on ne fait pas attention à nos propres comportements racistes aussi « petits » peuvent-ils être par moments, on reste du côté des oppresseurs.
Non seulement cette pause m’a-t-elle fait du bien au cœur, qui n’en pouvait plus de brasser toujours des émotions difficiles, mais elle m’a aussi permis de réfléchir à comment, moi, je pouvais faire une différence. J’ai alors compris qu’il est important d’abord de s’informer avec des sources fiables et de s’éduquer pour briser les préjugés. J’ai aussi compris que chacun se mobilise à sa façon et dans la mesure qu’il lui est possible de le faire, sans culpabiliser de ne pas en faire assez. Puis, que la meilleure façon d’aider est avant tout d’analyser et d’améliorer ses propres comportements pour être un bon acteur de changement, mais surtout être cohérent. Enfin, j’ai compris qu’il est normal d’être touché par des évènements aussi douloureux, que c’est primordial de s’écouter et qu’on ne devrait jamais se forcer à tout lire ni regarder ce qui ne nous fait pas du bien. On devrait plutôt toujours faire notre possible et s’informer sur comment on pourrait être utile autrement.
D’ailleurs, si vous avez été touché par divers évènements de l’actualité dernièrement et que vous ressentez le besoin de parler, je vous invite à faire appel aux services d’aide psychosociaux de votre région.