En amour, on parle souvent de la passion du début. Du rouge aux joues, du cœur qui s’accélère, des fameux papillons qui se posent dans notre ventre et sèment des parcelles de bonheur, de l’effervescence qu’on ressent à la seule mention de l’être aimé.
Nous sommes tous d’accord pour dire que l’émoi du début finit par laisser sa place à quelque chose de plus routinier, de moins spontané, de plus neutre. On s’aime toujours, parfois plus solidement même, mais les papillons volent moins haut, se font parfois trop discrets ou finissent carrément par déserter la zone près du cœur.
On ne se le souhaite jamais, mais ça se peut que ça arrive.
Il y a quelques semaines, mon chum m’a avoué s’ennuyer de ceux-ci.
Oh, il m’aime toujours, plus que jamais même, selon ses dires. Mais l’excitation du début n’est plus présente. Nos lèvres se touchent encore régulièrement avec passion, mais souvent aussi de façon mécanique. Sans même s’en rendre compte, elles s’unissent le matin et le soir parce qu’elles font partie d’une routine bien établie. Quand elles se rencontrent au beau milieu de la journée, c’est parce qu’il se passe quelque chose de spécial ou qu’elles retrouvent une petite étincelle qui rejaillit pour une raison ou une autre.
Nos étreintes sont encore passionnées puisque nos corps se connaissent maintenant à la perfection. Mais il n’y a plus la surprise ou le défi du début. La quête du plaisir charnel emprunte un sentier que l’on a mainte fois exploré et qu’on connaît par cœur. On éprouve encore du plaisir, beaucoup même. Mais il nous arrive maintenant de vouloir nous coller parce que ça fait longtemps qu’on ne l’a pas fait et qu’avec les enfants, c’est maintenant beaucoup plus difficile de caser l’amour dans un agenda déjà bien rempli.
Quand mon chum m’a avoué ça, j’ai été obligé de lui donner raison. Nos débuts sont de plus en plus loin avec le temps qui passe. Les étoiles traversent encore souvent nos regards et il y a bien quelques monarques qui se faufilent entre nous de temps en temps. Mais soyons réalistes, notre relation a évolué et c’est parfaitement normal.
Est-ce une raison pour ne pas tenter d’y remédier ? Oh que non !
J’ai décidé de me transformer en chasseuse et de partir à la recherche de papillons, nos papillons. J’étais convaincue qu’ils n’étaient pas partis pour toujours, qu’ils s’étaient juste un peu éloignés pour reprendre des forces.
J’ai voulu les ramener sous notre toit, afin de prouver à la vie et surtout à mon chum qu’on pouvait encore être un couple qui s’aime comme au début.
J’ai planifié quelque chose de bien simple.
Parce que c’est ce que je prône la plupart du temps, la simplicité.
J’ai regardé nos agendas, j’ai sélectionné une journée au beau milieu de la semaine. Plus précisément un mercredi, puisque mon chum est toujours en congé cette journée-là et que fiston est à l’école. Les chances que je me sente coupable d’organiser une journée spéciale diminuent considérablement sachant que je n’ai pas à lui demander de prendre congé et que je ne peux faire manquer des cours à ma progéniture.
Parce que oui, je suis le genre de mère qui n’a jamais pris congé du travail sans son fils, à part lorsqu’il a de l’école. Je ne juge personne ici. C’est un choix totalement personnel.
J’ai noté la journée spéciale dans ma tête, et j’ai décidé de garder la date secrète jusqu’au jour J. Premièrement, j’adore faire des surprises, et deuxièmement, j’avais peur de créer des attentes des deux côtés et risquer qu’on soit déçus tous les deux. Je préférais être la seule à l’être s’il le fallait.
Parce que oui, je suis le genre de fille à se faire des attentes et être déçue quand les choses ne se déroulent pas comme je l’ai imaginé. Mon chum me répète toujours que la pire chose à faire est de se créer des attentes. Mais comme il lui arrive aussi de ne pas suivre ses propres conseils, je l’écoute souvent distraitement lorsqu’il me sort celle-là.
J’ai gardé le secret jusqu’au bout, mettant mon fils dans le coup la veille seulement quand je lui ai annoncé qu’il ne prendrait pas l’autobus le lendemain et que je lui payais un petit-déjeuner chez Tim avec un lift directement à l’école pour me faire pardonner et effacer le peu de culpabilité qui persistait à l’idée de ne pas l’inclure lors de notre journée.
Le matin même, mon chum ne se réveille pas à mon saut du lit. Il est loin de se douter de la surprise que je lui prépare. J’ai préparé mes choses comme je le fais toujours : maquillage, lunch, brossage de dent, choix des vêtements. La seule différence réside dans les dessous féminins que j’ai choisis avec un peu plus de soin qu’à l’habitude. On quitte la maison, mon fils et moi, bien heureux de notre petit moment matinal au café du coin et de notre trajet en voiture qui n’a plus lieu depuis son entrée au secondaire. Je lui explique que c’est pour former une famille avec des parents qui s’aiment encore longtemps que j’ai décidé de nous offrir, son père et moi, une journée en amoureux. Comme j’ai le garçon le plus compréhensif du monde et que son pardon est beaucoup plus facile à avoir après un bagel BLT et un beigne, j’ai sa bénédiction.
Comme je me dévoile habituellement beaucoup sur Internet parce que hey… j’aime ça te parler de ma vie, je pourrais te raconter la journée en détail. Mais j’ai décidé de garder intacte la petite bulle d’amour que nous avons réussi à créer ce jour-là.
Mais je peux te dire que la surprise a été réussie et surtout… que les papillons sont encore bien vivants.
Ils sont juste attirés par d’autres contrées de temps en temps, mais ils finissent toujours par retrouver le chemin de nos cœurs.
Et cette fois-ci, je n’attendrai pas 14 ans avant de leur rappeler qu’on existe.