Nous aurons toujours le temps.
Le temps de se revoir.
Le temps de se jaser.
Le temps de se faire un petit souper en tête-à-tête.
Bref, c’est ce qu’on se dit toujours.
Dan. Je me souviens de toi.
De notre rencontre.
Été 2010.
Tu étais assis dans un coin de mon café, l’air rêveur, probablement a des années-lumière de l’instant présent…
Et pourtant, je me suis sentie ancrée à toi, dès le premier instant où mes yeux se sont posés sur ton être.
« Puis-je avoir d’autre eau chaude stp? » m’as-tu gentiment demandé avec ton sourire sincère, en me tendant ta théière.
Voilà. L’univers venait de nous connecter.
Tant de mes pauses ai-je passé ensuite, assise face à toi, à partager un thé sakura à la cerise.
De ton art tu me parlais, avec passion. Chaque cellule de ton corps étaient imprégnées de créativité, de sagesse, de douceur.
Plus je te connaissais et plus je ne pouvais que constater que ton âme était l’écho de la mienne. Tel un miroir. Un reflet.
Dan, mon ami-artiste, disais-je aux autres, en parlant de toi.
Dan à la tuque sur la tête, été comme hiver.
Dan, le sculpteur.
Dan, le créateur.
Le coup de foudre que j’ai eu, en voyant ton œuvre, ton bébé, ta femme de dos et de face, peinte de quelques traits sur une toile géante en textile épais…
Encore à ce jour, je ne peux croire qu’elle est mienne. À tout jamais.
Je la contemple et je sens ce continuum d’énergie qui la transperce subtilement, intensément, de manière omniprésente.
Je me suis toujours sentie entourée de ton essence à travers celle-ci. Et vice-versa.
On se disait que c’était notre portail l’un vers l’autre, malgré le quotidien de la vie, au-delà des mois qui filaient à la vitesse grand V et en dépit des rendez-vous manqués qu’on reportaient par manque de temps.
Tous les deux Balance de naissance, on se souhaitait tour à tour « Bonne fête » à chaque année et on se faisait un plaisir de s’asseoir devant un bon repas indien pour souligner le tout.
Je suis reconnaissante pour ces moments privilégiés que nous avons eus, dans notre restaurant favori, à rire et à s’émerveiller de la simplicité de la vie.
On se parlait de nos rêves, moi de famille et toi de voyages.
Je souhaitais des enfants, tu désirais fouler des terres inconnues.
Deux êtres fusionnés par des passions discordantes mais toutes aussi bien égales.
Avec le temps, nos projets distincts ont eu le dessus sur notre belle relation.
Tu avais mille et une ambitions qui se pointaient à l’horizon; ton art était demandé de plus en plus loin…
Tu es même parti à Sotchi en 2014, pour les Jeux Olympiques.
J’étais alors enceinte de ma fille Soléa.
Nous étions en train de réaliser nos ambitions les plus attendues.
À ton retour, nous avons bien tentés de nous revoir; tu me disais que tu avais tant d’histoires à me raconter, je sentais que tu avais enfin la vie que tu voulais.
J’étais heureuse pour toi.
Ensuite, tu as rencontré celle qui t’a comblé d’amour. Tu l’as marié.
On a remis encore et encore notre souper.
Puis… me voici.
Ici, dans le noir, à pleurer …
À me rendre compte que tu as rendu l’âme en avril 2019… 2 ans déjà… et que je ne l’ai pas su… et que je ne sais pas ce qui t’a ravi de mon existence…
Pourquoi? Comment? Pourquoi? Pourquoi?
Je ne sais pas, et je ne sais pas si je le saurai un jour…
Et je me dis que finalement le temps, c’est encore plus précieux que je le croyais.
Et qu’on ne sait jamais quand un souper n’aura plus jamais lieu…
Qu’on remet à plus tard, sans penser que le plus tard n’arrivera jamais.
Mes derniers mots pour toi auront été:
« Je te laisse dormir Daniel, bisous xx »
Je suis sans mot. Et sans toi.
Je t’embrasse où que tu sois. XX