Mon petit écran bleu à portée de main en tout temps, j’étale ma vie sur les réseaux sociaux depuis leur apparition.
Partage de nouvelles, de moments de bonheur, de souvenirs, de réussites, de pétages de coche, de belles photos avec ou sans filtres, de statuts plus ou moins pertinents. Des opinions de gauche, de droite, de cœur, de tête. Des fois, j’ai raison, des fois, je suis dans le champ.
Des likes, des coups de gueule, des émojis fâchés, des GIF, des prises de position, des commentaires qui approuvent, qui dénoncent, qui font rire.
J’ai tout fait sur le Web. Ou presque.
J’ai mis des photos de ma bouffe, de mon corps en maillot, de mes complexes, de ma famille, de mon couple. J’ai effacé des gens de mes abonnés, j’ai suivi des gens sans intérêt, j’ai admiré des personnalités qui semblaient me ressembler.
Je me suis inspirée des influenceurs mode, des mamans qui donnent des conseils, des personnalités qui vantent un produit. J’ai voulu être tout le monde et personne à la fois.
J’ai gagné des concours, j’ai vécu des expériences EXTRAORDINAIRES grâce au Web. J’ai fait des rencontres marquantes, j’ai fondé ma propre plateforme sur laquelle je m’exprime avec plaisir et authenticité chaque jour. J’ai été lue, comprise, appuyée, encouragée, aimée, je dirais même.
Mais le côté sombre est puissant. Tel un tsunami, la vague qui vient se fracasser sur toi quand le Web se déchaîne à ton endroit, ça laisse des traces. Certaines sont foudroyantes, te font avaler de l’eau, te coupent le souffle.
Ça te brise un peu en dedans.
J’ai été banni d’une page pour avoir exprimé mon désaccord. J’ai reçu des insultes, des menaces, des photos inappropriées. J’ai dû bloquer des gens, prendre quelques pauses des réseaux sociaux. J’ai eu peur, j’ai eu mal.
J’ai été méchante, moi aussi.
J’ai dû faire face à un côté très laid de moi. J’ai envié, je me suis comparée, j’ai voulu faire du mal. J’ai déjà exploité mon côté sombre qui ne me ressemble pas. Je l’ai laissé prendre le dessus et j’ai écrit des choses. J’ai posé des actions.
Je le reconnais : le Web peut faire de moi le pire et le meilleur humain.
Vie réelle ou vie virtuelle, j’ai souvent mélangé les deux. J’ai longtemps pensé que les gens étaient pareils en vrai que sur les réseaux sociaux. Que ce qu’ils montrent tout le temps, c’est ce qu’ils sont réellement.
Mon doux que je suis tombée de haut quand je me suis rendu compte que ce n’était pas le cas de tous. Que la vie sur le Web, c’est pas toujours #lavraievie. J’ai rencontré des gens tous sourires dans leurs stories. Des gens qui te disent qu’ils sont ouverts à te parler, à te rencontrer, qui t’invitent à venir leur jaser si jamais tu les croises un jour. Pis qui t’accordent à peine un regard quand ce moment arrive.
J’ai été tellement déçue de certaines personnes.
Des connues et des plus connues encore. De leurs actes, de leurs prises de position, de leurs façons de voir les choses.
J’en ai peut-être déçu, moi aussi. Par mes opinions, mes commentaires, ma façon de me positionner sur un sujet, par mes idéologies, ma psychologie à 5 cents. J’ai peut-être choqué, fait lever les yeux au ciel, fait pleurer même.
J’ai perdu mes illusions sur le Web le jour où j’ai compris qu’on ne pouvait pas y être parfaite.
Peu importe ce qu’on y publie, ce qu’on y dénonce, ce qu’on y encourage.
Y’aura toujours quelqu’un pour nous dire que ce n’est pas correct. Ou pour nous faire sentir qu’on n’est pas assez, qu’on est trop, qu’on est inadéquat.
J’ai perdu mes illusions sur le Web, mais j’aime quand même continuer à y surfer tous les jours.
J’ai juste appris à mieux nager.
À repérer les bouées de sauvetage.
Pis des fois à prendre le large.