Seule sur mon quai.
Seule au monde, seule de mon monde,
Loin de mes enfants, loin de mon chéri.
Sans horaire, ni réseaux sociaux…
Me voici face à moi-même.
Face à la femme que je suis devenue.
Face à cette presqu’inconnue.
Saurons-nous, nous retrouver?
J’observe mon reflet limpide sur ce lac d’un calme enveloppant.
Ces traits-là, je les reconnais aisément…
Il y a 40 ans que je les regarde,
Que le miroir me les renvoie chaque matin.
Ce portrait, je l’ai vu changer,
Au fil des automnes et au gré du temps.
Je me souviens de chaque pore qui se s’est remanié de façon continue.
Du teint rosâtre et lisse de mon enfance,
À ma bouille d’adolescente, dépouillée du fameux gras de bébé sur mes joues.
De mon visage épanoui et à l’apogée de sa splendeur dans ma vingtaine,
Puis à mon faciès orné de cernes des premières années post-enfants…
Et à celui-ci…
Agrémenté de rides et d’imperfections, qui dissertent sur mon vécu, sur les chemins que j’ai foulés et sur le poids de l’âge qui m’a rejoint.
Cette pause, je me la devais…
Ce silence, je me le souhaitais,
En soufflant sur mes quelques chandelles!
Dans mon perpétuel brouhaha quotidien,
Je recherchais à me recueillir,
Je rêvassais à ce moment monastérien.
Et m’y voici.
Dans ma retraite personnelle.
Au bout de ce quai, si spécial.
Assise dans ce brouillard majestueux,
À l’abri de toutes distractions.
Je me sens voguer, à la dérive,
Sur ce quai pourtant bien immobile.
Figé.
À la fois réel et irréel.
L’illusion est d’un réalisme fulgurant.
J’ai l’impression de traverser les différentes rivières de mon vécu.
Devant ce panorama perpétuel,
De ma Vie, de mes Souvenirs,
Je pleure, je souris, je revis…
Un seul constat:
Je suis exactement où je devrais être!
Je ne parle pu ici de mon état présent,
Accroupie au beau milieu de ce quai,
Encore de ce merveilleux quai!
Mais bien de ma place dans ma vie,
Dans ma frise chronologique…
Je suis avec celui que je voulais depuis toujours.
Je suis mère, le rôle de mon existence.
Je suis éducatrice, l’emploi qui n’en est pas un, tellement il me passionne.
Je suis fille, sœur, marraine, amie,…
Je suis tout bonnement,
Tout ce que j’ai voulu être.
Et j’ai beau me demander,
Ce que je ferai maintenant, alors que j’ai accompli ce que j’aspirais être…?
Dans 5, 10 ans, où serais-je?
Que seront mes rêves?
Je sais que je serai à la même place.
Que ma ligne du temps sera intacte.
Que seule la corde de mon ancre aura gondolée.
Et cette seule pensée me réjouie.
Je suis une femme de constance.
Je l’ai toujours été.
Ma plus grande sécurité, c’est la routine.
Plusieurs la craignent, moi, je l’embrasse.
Pour 48 heures, je me suis évadée.
J’ai momentanément fuit mon nid.
Je n’ai pris que moi-même et mes pensées puis j’ai roulé vers un havre de paix qui m’était totalement destiné…
Je me suis forcée à foncer vers un espace vide de tout.
Là-bas, j’y ai laissée mes soucis et toutes mes insécurités…
Et autour de ce lac pittoresque, j’ai pu enfin penser à moi.
À juste moi.
Pour une fois.
N’entendre que la nature et ma voix intérieure m’a été plus que bénéfique.
Je sais désormais que je dois réapprendre à m’écouter, à être égoïste dans mon immense générosité envers les autres.
On m’a toujours dit que pour aimer, il faut avant tout s’avoir s’aimer…
C’est tout à fait vrai!
Désormais, quand j’ai besoin de me retrouver, je ferme les yeux et je me revois sur mon quai… le silence qui m’entoure de ses bras doux et l’air qui m’apaise par sa fraîcheur.
Je n’aurais pas pu m’offrir meilleur cadeau que celui-là.
La paix d’esprit et de corps.
One Comment
Marc
Magnifique..jsuis ému..merci..🙏