meilleurs

Ils sont tous meilleurs que moi

C’est longtemps ce que j’ai pensé. Et c’est encore trop souvent ce que je pense aujourd’hui. Peu importe où je me trouve, peu importe ce que je fais, j’ai toujours cette impression d’être en dessous des autres. Comme si tout le monde autour de moi avait reçu une longueur d’avance et que moi, je cours derrière, toujours essoufflée, incapable de les rattraper. Ils sont tous meilleurs que moi.

Je fais des efforts. J’avance. Mais même quand j’ai l’impression d’avoir atteint un certain niveau, je regarde autour et je me dis que ce n’est pas assez. Les autres sont plus talentueux, plus brillants, plus déterminés. Et moi, je me sens comme une pâle copie, comme un brouillon jamais corrigé.

J’ai l’impression de ne jamais rien avoir gagné de ma vie. À part quelques concours de hasard, des victoires qui ne sont pas vraiment les miennes.

Parce que ça, c’est juste la chance.

Rien qui prouve que j’ai de la valeur, rien qui me confirme que je mérite ma place. Les gens de l’extérieur peuvent peut-être penser que je suis chanceuse. Mais moi, je sais que ça ne vient pas de moi. Je ne me suis jamais sentie gagnante, jamais sentie « choisie » pour mes efforts, pour ce que je suis.

Peut-être que ça vient du fait d’avoir grandi dans une famille où j’ai souvent eu l’impression d’être la deuxième. Pas la plus rapide, pas la plus talentueuse, pas la plus sportive, pas la première à qui on pense. Toujours celle qui suit, jamais celle qui ouvre le chemin. Et à force de me voir ainsi, c’est comme si mon cerveau avait enregistré ce rôle et refusait de le laisser aller. Comme si une cassette me répètait sans arrêt qu’ils sont tous meilleurs que moi.

C’est un peu comme si je vivais dans une salle pleine de miroirs déformants : peu importe l’angle, je ne me vois jamais assez grande, assez forte, assez belle, assez brillante. Même si je me tiens debout au même niveau que les autres, j’ai toujours l’impression d’être plus petite, moins visible. Je peux être dans la même pièce, mais mon reflet, lui, me renvoie toujours une version diminuée.

Parfois, je me dis que je vis ma vie comme une spectatrice. Comme si j’étais assise dans les gradins à regarder les autres performer sur scène. Je peux applaudir, je peux encourager, mais je ne ressens jamais que je fais vraiment partie du spectacle.

Et ça, ça laisse un vide difficile à combler.

Jennifer signature