1993
La rue Bruchési.
I will always love you joue pour la 23ième fois sur ma cassette de la trame sonore du film « The bodyguard ». Je n’ai rien d’une grande chanteuse, mais avec ELLE, Whitney, ma voix semble moins fausse… et puis je chante au travers de mon micro, voire mon ventilateur sur pied, alors ma voix est encore plus « spéciale »! Hahaha!
À des millions d’années-lumière des cellulaires et des réseaux sociaux, j’attends que la ligne téléphonique se libère pour pouvoir appeler ma best Ana, et lui demander si elle veut bien aller magasiner au Centre commercial Côte-Vertu avec moi.
(Wow! Je viens de réaliser que « dans mon temps », planifier une simple sortie ne se faisait pas aussi aisément qu’aujourd’hui.)
Nous voici donc, 90 minutes plus tard, au coin de la rue Charland, à courir pour ne pas rater notre autobus 121. Mes grandes boucles d’oreilles créoles qui se balancent dans tous les sens, mes jeans pattes d’éléphant qui traînent au sol, j’ai à peine le temps de sortir mon billet d’autobus et le donner au chauffeur, qu’il démarre en trombe.
On s’assoit dans le fond du bus, et d’un seul écouteur chacune, nous entendons la musique entraînante d’Ace of Base sur mon Walk-Man.
Durant le trajet, on parle de nos cours au secondaire, des professeurs, des derniers ragots de l’école et de nos amis.
Ce chemin, nous avons dû le faire des centaines de fois, pour aller faire du lèche-vitrine plus que pour réellement acheter des vêtements. Des fous rires, nous en avons eus, à ne plus être capables de s’arrêter ou de se souvenir comment cela avait débuté.
C’est le genre de souvenir qui vous décroche un sourire, n’importe quand. Qui vous rappelle que dans l’adolescence, c’était la belle vie, sans responsabilité lourde ou de questionnement existentiel.
Montréal est empreinte de ces moments : dans mon quartier, à chaque coin de rue que j’ai frôlé, dans les parcs que j’ai fréquentés, les ruelles où j’ai pédalé.
St-Michel, c’est mon patelin, mon tapis de bienvenue sur cette planète. Montréal m’a vue grandir, m’émerveiller, m’épanouir, me morfondre, m’exciter, rêver.
Montréal, c’est mes racines.
Quand j’y reviens, mon cœur de jeune fille revit.
Je m’y sens accueillie.
Bien sûr, elle a beaucoup changée.
Les nids-de-poule, les infâmes cônes orange, les taxis trop pressés… Or, je l’aime telle qu’elle est. Inconditionnellement.
C’est ma ville depuis toujours, elle est vivante, multiculturelle, en constant développement et surtout, elle est vraie!
Étant maintenant en banlieue, Montréal est une oasis, une ressource, où je retourne lorsque j’ai la nécessité de refaire un plein.
Le marché Jean-Talon, la rue Fleury, le parc des Hirondelles, le Métro; tous des lieux que j’aime revoir et faire connaître à mes enfants.
Eux grandiront à Mascouche, connaîtront les grandes cours, les autobus aux heures et les maisons 3 étages…
Une tout autre expérience de vie, certes, mais elle leur sera propre et à l’image de ce qu’ils y auront vécus.
J’ai bien hâte de comparer leurs réalités et les souvenirs qui les auront animés durant leur jeunesse.