Le petit prince

Ma lecture du Petit Prince en tant que «grande personne»

J’avais lu le roman Le petit prince d’Antoine de Saint-Exupéry quand j’étais écolière. Après avoir analysé quelques extraits du livre en classe, l’enseignante nous avait suggéré de le relire dans 10 ans, puis 10 ans plus tard, et 10 ans après. En vieillissant, notre regard sur l’histoire change et nous apporte des réflexions différentes.

J’avais le goût de partager ma lecture de «grande personne» de ce roman. Parce qu’en effet, bien que ce roman s’adresse aux enfants, il est riche en morales et analogies qui font du bien à lire en tant qu’adultes. Un peu comme quand on regarde un film pour enfants et qu’on comprend que certains passages s’adressent plus aux parents qu’au jeune public.

Le roman est narré par un adulte qui rencontre un garçon, le petit prince, au plein milieu du désert. Le jeune personnage vient d’une autre planète et il a atterri en Afrique puisqu’il avait entendu dire que la Terre est un lieu intéressant à visiter.

Dessine-moi un mouton et l’analogie de se fier aux apparences

La première discussion du narrateur avec le petit prince est qu’il lui demande de lui dessiner un mouton, de sorte qu’il pourra le ramener sur sa petite planète à lui. On sait bien qu’une illustration d’un animal ne le matérialise pas, mais selon lui, ça fonctionne. Puis vient une discussion sur le dessin et le fait que les adultes se fient juste aux apparences et à ce qu’ils connaissent déjà. On raconte l’histoire d’un astronome turc qui a découvert un astéroïde. Quand il a présenté sa découverte dans un congrès, il arborait le costume traditionnel de son pays. Bien que sa présentation fût grandiose, personne ne l’a cru à cause de son accoutrement. Puis, il donna la même présentation quelques années plus tard en portant un habit élégant. Cette fois-ci, tout le monde l’a cru et il a reçu la reconnaissance de la communauté astronome. Comme quoi, les adultes se fient juste à l’apparence.

«[Les grandes personnes] sont comme ça. Il ne faut pas leur en vouloir. Les enfants doivent être très indulgents envers les grandes personnes» page 24.

L’acharnement au travail raconté par un enfant

J’ai bien aimé l’allusion à l’acharnement du travail qui semble bien futile aux yeux du petit prince. Ce dernier raconte qu’il s’était promené d’une planète à l’autre. Il rencontre un businessman qui passe tout son temps à compter les étoiles. L’homme se trouve sérieux puisqu’il fait des choses importantes. De son côté, le petit prince ne comprend pas pourquoi le businessman compte des étoiles qu’il ne possède pas. «Moi, je possède une fleur que j’arrose tous les jours […] c’est utile à ma fleur que je [la] possède. Mais tu n’es pas utile aux étoiles… » page 53. Je trouve que la réflexion se colle bien à quelques faits que j’ai vécus au travail. Comme les fois que j’ai investi un nombre démesuré d’heures dans un rapport qui, finalement, ne sert pas parce que le projet a été reporté aux calendes grecques. Je me permets de nuancer mes propos : parfois, on reçoit une consigne et on l’exécute. Pas le choix, c’est le travail. Mais c’est intéressant de prendre un pas de recul et de se poser la question sur tout ce temps passé sur une tâche ou un projet et d’évaluer si ça valait la peine. Est-ce que j’aurais pu avancer un autre projet à la place?

Un autre extrait du livre m’a fait réfléchir sur la thématique du travail. Le petit prince explique qu’il a rencontré un allumeur de réverbère sur une autre planète. L’allumeur allumait le réverbère le matin et l’éteignait au coucher du soleil. Avec le temps, sa planète s’est mise à tourner plus rapidement, de sorte qu’il est constamment en train d’allumer son réverbère et de l’éteindre, sans avoir une pause pour se reposer ni dormir. On comprend donc que l’allumeur n’a pas su adapter son rythme de travail avec sa planète. Personnellement, je trouvais que c’était le personnage le plus absurde parmi tous ceux que le petit prince a rencontrés. Toutefois, il avoue qu’il a une certaine sympathie envers l’allumeur puisqu’il est le seul qui s’occupe d’autre chose que de lui-même. C’est quand même touchant, non? Le petit prince, de son côté, voit une force dans ce que je percevais comme une faiblesse.

L’apprivoisement et les relations humaines

Je termine mon analyse de «grande personne» avec la rencontre du petit prince et le renard.

Le petit prince rencontre un renard qui lui demande de l’apprivoiser. Le renard connaît les hommes qui veulent le chasser. Comment savoir si le petit prince veut le chasser ou non? En l’apprivoisant, le renard va considérer le petit prince comme différent des autres humains et il aura une réaction différente envers lui. Et quand le petit prince et le renard vont se quitter, ils garderont un souvenir l’un de l’autre, malgré qu’ils soient tristes de partir. C’est pour cette raison que la rose du petit prince est si spéciale, comparativement aux autres roses. Il l’a arrosée, il l’a protégée, il l’a écoutée se plaindre. Cette rose spécifique est spéciale puisqu’ils se sont apprivoisés.

C’est la plus belle rencontre qu’il fait, selon moi. Il s’agit d’une belle métaphore sur les relations entre les personnes. Pourquoi, parmi tous les humains de la Terre, on crée des liens avec certaines personnes? Eh bien, c’est parce qu’on a grandi avec nos frères et sœurs, on est allés à l’école avec des amis, on a vécu des moments importants avec des collègues, etc. Et quand on les quitte, on conserve ces souvenirs. Comme une histoire qu’on a vécue et qu’on se raconte. Cette analogie s’applique aussi avec nos animaux de compagnie ou encore avec les objets auxquels on a un attachement sentimental.

Je me rappelle que la rencontre du petit prince avec le renard m’avait marquée quand j’avais lu le roman à l’école. Je me souvenais que le renard voulait développer une relation avec le petit prince. En lui demandant de l’apprivoiser, je comprenais que les relations se bâtissent avec le temps. Et maintenant, en tant qu’adulte, je perçois un autre message, soit celui de «marquer» les personnes autour de nous avec les gestes que l’on pose et ce que l’on vit ensemble.

Je garde donc le roman de côté et je le relis dans 10 ans afin de voir comment j’interprète les leçons que le petit prince enseigne aux grandes personnes.

Josée Provost signature
Catherine Duguay signature

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