grossophobie

La grossophobie à l’ère du confinement actuel

Beaucoup de blogues ont écrit des textes sur la grossophobie grandissante que l’on voit actuellement, mais je ne pouvais m’empêcher d’écrire, moi aussi, là-dessus parce que, cibole, ça crée de l’angoisse tout ça.

Premièrement, je suis grosse. Ce n’est pas une surprise et je le sais. Est-ce que ça change quelque chose en lien avec qui je suis ? Non. Je ne dis pas que c’est facile chaque jour, peu importe le corps que l’on a, on a des complexes et des journées où on s’aime moins, mais je suis comme je suis. Je préfère travailler très fort sur ma personnalité, mon mental, que d’essayer de perdre du poids. Pourquoi devrais-je maigrir ? Ah, ce mot que je déteste tant ! Pourquoi, aux yeux de notre société, je devrais avoir un corps correspondant à la perfection ? Pourtant, mon corps, je le trouve parfait. Pas à chaque jour, c’est certain, mais j’ai appris à l’aimer comme il est et je me sens bien. Me référer au corps des autres, je l’ai longtemps fait, malheureusement on est tous différents, c’est juste impossible d’arriver à copier un autre humain.

J’ai l’air très sereine et d’être l’exemple parfait de la femme grosse qui s’aime tellement. Mais j’ai été mince, je me suis détestée longtemps. J’avais peur d’être grosse, sans le savoir, j’avais déjà des propos grossophobes parce que dans ma tête ma vie serait horrible. J’ai grandi avec une mère qui accordait beaucoup d’importance à sa perte de poids et un père qui voulait trop l’aider, mais pas toujours de la bonne façon. Le poids était partout, tout le temps autour de moi dans ma famille.

Quand j’ai commencé à prendre du poids, j’étais en couple. C’est là que j’ai vécu ma première expérience grossophobe. Premièrement, j’ai su, après avoir débuté ma relation, que mon ex hésitait à s’attacher à moi parce que je ne correspondais pas physiquement à « ce qu’il était habitué ». Il avait l’habitude d’avoir des blondes très minces et avec peu de formes. Moi j’étais le contraire, j’étais mince, voluptueuse et avec des formes. Je portais du médium large à cette époque et ça m’a blessé et ne m’a pas aidé avec ma peur de prendre du poids.

Mais l’amour est ce qu’il est, je me suis dit qu’il m’aimait pour qui je suis et non de ce que j’ai l’air. Ça a été ça pendant un temps, mais dès que je suis tombée en dépression, mon corps a crissement changé. J’ai pris beaucoup de poids et je suis devenue grosse (je suis passé d’une shape mince à une shape grosse). Ça se voyait dans ses yeux, dans ses commentaires que ça le chicotait. Il m’a même déjà dit « Je dois m’habituer à ton nouveau corps ». En y repensant aujourd’hui, je n’aurais pas dû en prendre autant sur mes épaules en croyant que c’était ma faute si la flamme s’était éteinte. Ce n’était pas un « nouveau » corps, c’était mon corps tout simplement. Ses mots ont créé une bombe dans mon estime personnelle et j’ai commencé à me détester parce que je croyais que ce n’était pas possible d’être heureuse, d’être désirée quand tu es une personne grosse.

Bref. C’est là que j’ai commencé à vivre l’enfer avec mon corps. Ça a duré longtemps. Chaque bouchée de nourriture était un calvaire, un sacrifice et une honte pour moi. Je me cachais pour manger et je n’avais plus de fond. Je mangeais mes émotions et je culpabilisais durant des jours après. Je portais des vêtements amples pour cacher ma grosse poitrine, mes formes, tout mon moi. Mon estime personnelle était à zéro. Je passais mon temps à me comparer à ce dont j’avais l’air avant au lieu d’aller de l’avant. Je croisais de vieilles connaissances qui me regardaient de travers, j’ai eu droit à des commentaires du genre « Est-ce que tu t’entraines pour redevenir mince ? » « Es-tu malade pour avoir pris autant de poids ? » « Ah pauvre toi, ça doit pas être facile ! ». Et quand j’ai commencé à me débarrasser de mes vêtements trop petits, une amie (ancienne) m’a dit : « Tu devrais les garder, ça va te motiver à maigrir pour pouvoir rentrer dedans de nouveau ». Ouf !

C’est la thérapie qui m’a sauvée de mon cercle vicieux. J’ai appris à m’aimer, ma relation avec la nourriture a vraiment changé et mon regard sur moi également. On m’a appris que tout part de moi, pas des autres. Maintenant :

Je n’ai pas de balance pour me peser, je ne sais pas combien je pèse.

Même si j’aime pas une photo de moi, je m’en fous, c’est moi tout court et c’est normal si j’ai « l’air grosse », je suis grosse.

Je n’ai pas de problèmes de santé reliés à mon poids. Même si mon médecin m’encourage à atteindre mon « poids santé », je l’envoie chier dans ma tête.

Je mange ce que je veux, quand je veux et la quantité que je veux. Pis sais-tu quoi ? Je mange bien, à ma faim, et mon corps ne change pas. Mon corps est pareil depuis 3 ans.

Je ne me cache plus. Je porte les vêtements que je trouve beaux, je me crée des looks dans lesquels je me trouve sexy, je le fais pour moi.

Je ne me force pas. Pour rien.

En ce moment, je dois dire que ma sensibilité est intensifiée. Certains commentaires ont réussi à m’atteindre. J’avais l’impression que je n’avais pas le droit d’être grosse et que ce n’est pas normal de l’être. Tout l’amour que j’ai pour mon corps a été un peu effrité. Mon vieux patern était de retour. Heureusement qu’il existe une communauté de femmes incroyables pour me rappeler que ce n’est pas normal de véhiculer des messages grossophobes qui pourraient intensifier des troubles alimentaires et détruire des vies : @dixoctobre @grossophobie.ca @jessicaprdnc @sandra.munoz.diaz @coeurdartacho

Le poids d’une personne ne devrait jamais être un sujet de conversation.

Aucun chiffre sur une balance ne devrait être une norme.

Aucune apparence ne devrait être plus belle qu’une autre.

L’exercice ne devrait jamais être autre chose qu’une activité pour être en forme et en santé. Le sport ne devrait jamais être publicisé en lien avec le poids. C’est censé être amusant, pas un calvaire !

En cette période difficile pour tous, la maladie mentale est fragile, ce n’est pas l’temps de parler de poids ! Pis être grosse, c’est juste une silhouette parmi tant d’autres, un corps parfait c’est le tien, tel qu’il est, point.

Karine signature
Karelle Gauthier

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